Fenêtre sur le passé : Policiers militaires ou officiers de la paix?
En 1985 un numéro de la revue Sentinelle des Forces canadiennes contenait un article intitulé «Policiers militaires ou officiers de la paix?», qui comparait les fonctions de la police militaire au Canada avec celles effectuées dans nos deux bases en Allemagne.
Cet article, reproduit dans son intégralité ci-dessous [1], donne un aperçu intéressant de la police militaire canadienne au milieu des années 1980.
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Lors d'un exercice de la série Securitas, le major Jean-Guy Plante, alors commandant du 5 PPM à Valcartier, prépare ses ordres en compagnie du sous-lieutenant Dorothy Paquette et de l'adjudant Paul Lachance (Photo : MDN/Sentinelle, volume 21, numéro 1, 1985)
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L'article suivant a paru à l'origine dans Sentinelle (revue des Forces canadiennes), volume 21, numéro 1, 1985, pages 16 et 17:
POLICIERS MILITAIRES OU AGENTS DE LA PAIX?
texte capitaine Jacques Tremblay
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Le contrôle de la circulation, des réfugiés et des prisonniers de guerre lors d'exercices militaires, comme des entrées et sorties des terrains de manœuvres, voilà une liste de tâches qui ne représente qu'une partie des responsabilités des agents de la paix des Forces canadiennes, mieux connus sous le nom de policiers militaires. En plus de ce travail essentiellement militaire, ces policiers doivent aussi s'acquitter des responsabilités d'agents de la paix semblables à celles de leurs homologues civils. Le lieu d'affectation dicte laquelle de ces tâches aura la priorité.
C'est après un séjour de 16 semaines à l'École du renseignement et de la sécurité des Forces canadiennes à Borden (Ont.) que le jeune policier militaire obtient sa qualification de métier de niveau 3. Son entraînement le prépare pour ses devoirs de policier militaire en campagne et de membre de la Sûreté.
Le 5e Peloton de Police militaire (5 PPM) de la base de Valcartier (Qué.) fournit le personnel pour accomplir les tâches qui ont trait aux manoeuvres en campagne, avec le 5e Groupe-brigade du Canada, ainsi qu'à la Sûreté de la base. Le commandant, le capitaine Richard Verret, porte donc deux « chapeaux » — ceux de commandant du 5 PPM et de chef de Sûreté de la base. « Ceci nous distingue de la situation qui existe en République fédérale d'Allemagne (R.F.A.) où les sections de Police militaire des bases de Lahr et de Baden-Soellingen s'occupent essentiellement de la Sûreté tandis que le 4 PPM, attaché au 4e Groupe-brigade mécanisé du Canada, accompagne les troupes en campagne, » précise le capitaine Verret.
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Une autre particularité en R.F.A. est que le policier militaire est appelé à exercer tous ses pouvoirs d'agent de la paix. « Tous les Canadiens relevant des Forces canadiennes en Europe, autant civils que militaires, sont soumis au code de discipline militaire que l'on doit faire respecter, » précise le capitaine Jim Deegan-Nicholson, chef de Sûreté de la base de Baden-Soellingen. En effet, au Canada les policiers militaires n'exercent qu'une partie de leurs pouvoirs d'agent de la paix et ce, dans l'enceinte des propriétés de la Défense nationale seulement. C'est toute autre chose pour les sections de Police militaire de Lahr et de Baden-Soellingen. « Étant la seule organisation policière canadienne, ceci implique que pour tout délit commis par un Canadien, que ce soit une simple conduite en état d'ébriété ou un meurtre, nous nous occupons de l'affaire de A à Z, » ajoute le capitaine Deegan-Nicholson. « Par exemple, si de la fausse monnaie circulait dans la base, nous ferions enquête, tandis qu'au Canada c'est une infraction qui relève de la juridiction fédérale.
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Règle générale, les seuls tribunaux auxquels les Canadiens relevant des Forces canadiennes en Europe peuvent avoir recours sont les cours martiales. Tout délinquant, dont la gravité de l'infraction justifie une comparution en cour y est jugé. C'est sans doute la raison pour laquelle on peut lire assez fréquemment dans les ordres courants des bases de Lahr et de Baden-Soellingen les résultats de cours martiales, « Afin d'aider les jeunes, on a mis sur pied un conseil de la jeunesse qui se penche sur les problèmes pertinents aux adolescents, » précise le capitaine Deegan-Nicholson.
Bien que les deux sections de Police militaire en R.F.A. n'effectuent que les tâches relatives à la Sûreté, la quantité et la complexité du travail qui y est accompli dépasse de beaucoup celui des pelotons au Canada dont les effectifs sont comparables. C'est pourquoi il est très rare de rencontrer en R.F.A., un policier militaire de grade inférieur à celui de caporal. « Lorsque les nouveaux arrivés se présentent à l'unité, révèle l'adjudant-maître Mel Pittman de la section de Police militaire de Lahr, « ils ne bénéficient que d'un cours d'orientation de huit heures avant d'entreprendre leur travail. « C'est peu pour 85 p. cent d'entre eux, qui en sont à leurs premières armes dans le contexte européen. L'adaptation se fait quand même sans trop de difficulté puisqu'ils se voient rapidement confier des missions de patrouilles dans une cinquantaine de villages allemands et une quinzaine de secteurs de logements familiaux où demeurent 15 000 Canadiens.
En dépit du défi susceptible d'en effrayer plusieurs, la majorité des membre de la Force de police militaire désire cette affectation outre-mer. Selon le major Jean-Guy Plante, officier d'état-major des opérations de la Police militaire en campagne au Quartier général de la Force mobile, « c'est là que nous avons l'occasion de mettre en pratique tout ce que nous avons appris. Ce qui n'est pas sans causer certains maux de tête. « J'ai cinq interprètes disponibles 24 heures sur 24 et quatre postes de personnel bilingue (anglais/ allemand), » souligne le capitaine Deegan-Nicholson.
Au pays, peut-être à cause de la nature du « double chapeau » exclusif aux pelotons de Police militaire des bases abritants des éléments de la Force mobile, l'agent de la paix des Forces canadiennes se considère plus militaire que policier, selon le capitaine Deegan-Nicholson. Cet avis est également par-tagé par le major Plante. « On dit à notre soldat d'être d'abord un militaire et ensuite un policier, » confie-t-il. Cette priorité accordée à l'aspect militaire du travail de policier s'explique bien lors-que le soldat Gilles Bellemare évoque son expérience: « Dans une tranchée avec un fantassin, tu n'es plus un policier mais un soldat. Je l'ai réalisé rapidement lors d'un exercice tactique avec un bataillon du Royal 22e Régiment. Les trois pelotons de Police militaire situés à Valcartier, Petawawa (Ont.) et Calgary (Alb.), ont comme tâche principale de supporter les unités combat-tantes. La dualité du travail a quand même ses bons côtés. Le fait de toucher aux deux aspects en même temps crée un effet bénéfique sur le moral. « En plus de briser la routine, les tâches en campagne offrent l'occasion de se sentir apprécié pour l'aide que nous fournissons aux unités, » explique le soldat Bellemare.
Un séjour en R.F.A., que ce soit avec une des sections de Police militaire ou le 4 PPM, est, selon l'avis de plusieurs policiers militaires, l'affectation idéale pour parfaire ses connaissances. Bien qu'on n'ait pas, comme à Valcartier, par exemple, la chance de briser la rou-tine en occupant en même temps les rôles de policier militaire en campagne et de membre de la Sûreté, il semble que ce soit une expérience particulièrement valorisante du côté professionnel. « On se rend compte que nos policiers qui reviennent de Lahr ou de Baden-Soellingen sont plus matures, plus sérieux et démontrent plus d'assurance dans leur travail quotidien, » con-fie l'adjudant-maître Claude Vaillancourt du 5 PPM.
1985/1 Sentinelle

Le sous-lieutenant Dorothy Paquette, qui apparaît sur la photo de couverture pour cet article Sentinelle, a poursuivi une carrière distinguée dans les Forces armées canadiennes. Après avoir été la première femme diplômée du Collège militaire du Canada à St-Jean en 1884, elle a commencé sa carrière de député avec le 5e Peloton de Police militaire (Valcartier) et a ensuite été officier de sécurité des base militaire à Cornwallis et Gagetown, en tant que membre du personnel de l'École du renseignement et de la sécurité des Forces canadiennes (Borden), en tant qu'officier d'état-major au quartier général du Commandement aérien (Winnipeg), en tant que grand prévôt adjoint au quartier général de la Défense nationale (Ottawa) et alors comme grand prévôt de la Force de stabilisation de l'OTAN en Bosnie-Herzegovine. En 2001, le colonel Dorothy Cooper (née Paquette) a été investie dans l'ordre du mérite militaire. Elle a ensuite servi de grand prévôt des Forces canadiennes de 2001 à 2005. Le colonel Cooper a occupé plusieurs postes de directrice au quartier général (hors de la branche PM) à Ottawa avant de prendre sa retraite des Forces armées canadiennes.
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Remarque:
1. Ce qui précède est une reproduction d'un article publié dans Sentinelle (volume 21, numéro 1, 1985, p. 16-17), pour lequel le MDN et les FAC conservent le droit d'auteur. Cette reproduction n'a pas été produite en affiliation avec le MDN ou les FAC ou avec leur approbation, mais elle est conforme aux lignes directrices pour une utilisation non commerciale, publiées à : https://www.canada.ca/fr/ministere-defense-nationale/organisation/propriete-intellectuelle/droit-auteur-couronne.html
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1. Ce qui précède est une reproduction d'un article publié dans Sentinelle (volume 21, numéro 1, 1985, p. 16-17), pour lequel le MDN et les FAC conservent le droit d'auteur. Cette reproduction n'a pas été produite en affiliation avec le MDN ou les FAC ou avec leur approbation, mais elle est conforme aux lignes directrices pour une utilisation non commerciale, publiées à : https://www.canada.ca/fr/ministere-defense-nationale/organisation/propriete-intellectuelle/droit-auteur-couronne.html